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Côte d’Ivoire : Promotion de l’accès à l’information et co-conception de stratégies de lutte contre la Brucellose

2 novembre 2023

A l’occasion de ce texte, Afrique One rends hommage au Prof.Rudovick Kazwala, chercheur émérite à Sokoine University of Agriculture, située dans la ville Morogoro, en Tanzanie, membre fondateur du consortium Afrique One, qui s’en est allé le 03 avril 2023. Il était le responsable du groupe de formation et de recherches d’Afrique One sur la brucellose qu’il a dirigé parfois depuis son lit d’hôpital jusqu’à son dernier souffle…

La brucellose, zoonose majeure, sévit toujours dans la faune sauvage, le bétail domestique et la population humaine dans les pays à faible revenus.

La Côte d’Ivoire a mis en place depuis 1970, des stratégies de lutte contre la brucellose, basées sur la sensibilisation des communautés et la vaccination du bétail domestique. Malgré les efforts constants des autorités sanitaires, la maladie persiste et s’étend à tel point qu’en 2017, elle a été classée parmi les cinq zoonoses prioritaires à éradiquer dans le cadre du de l’agenda globale de la sécurité sanitaire.

Inégalités dans l’accès à l’information comme facteur limitant de la lutte contre la brucellose

Les stratégies de lutte impliquent des actions préventives et curatives, nécessitant une participation active des communautés affectées ou à risque. Cependant, des recherches socio-anthropologiques menées au nord de la Côte d’Ivoire par Dr Stéphane Babo, du consortium de recherches Afrique One, ont révélé une asymétrie de connaissances sur la brucellose entre les acteurs de la santé publique et vétérinaire ; une asymétrie dans l’accès à l’information sur la maladie au sein des communautés entre les hommes et femmes.

« Il ressort des analyses que les hommes (propriétaires de bétail et les bergers), qui sont les interlocuteurs de premier plan des autorités de santé vétérinaire, sont généralement mieux informés sur la brucellose que les femmes. Pourtant, ces dernières sont autant exposées aux risques liés à la transmission de la brucellose que les hommes. Lors des soins aux animaux, les hommes obtiennent particulièrement des informations auprès des vétérinaires qui connaissent mieux la maladie. En revanche, les agents de santé publique, responsables de la santé humaine, présentent un déficit de connaissances sur la maladie mettant ainsi en cause le système de surveillance et de contrôle de la maladie », explique Dr Stéphane Babo.
Ainsi
, les femmes se heurtent à des obstacles socio-culturels et systémiques d’accès à l’information sanitaire alors elles sont très exposées à la maladie du fait de leur rôle dans la transformation du lait et des soins aux jeunes animaux.

Co-production des connaissances sanitaires entre la communauté et les acteurs du système de santé

D’après le consortium Afrique One, il est impératif que chaque partie prenante accède à la connaissance sur la brucellose pour engager une action collective avec en premier plan la frange de la population à risque, les enfants consommateurs de lait cru et les femmes du fait de leur profession de transformatrice de lait. Cela peut se faire dans un processus de co-production

« L’asymétrie de connaissance constatée entre les professionnels de la santé publique d’une part, les hommes et femmes d’autre part, incite au renforcement des capacités des différents acteurs et surtout à l’accès à une information équitablement partagée.  Pour nous, chercheurs, Il est crucial de comprendre les interactions des acteurs avec leur écosystème pour contribuer à l’opérationnalisation de l’approche intégrée, Une seule Santé, afin de lutter efficacement contre la brucellose. Il est important de comprendre que chaque acteur (communautaire ou institutionnel), même avec divers niveaux de connaissances sur la maladie, a une contribution importante à apporter dans la lutte contre la brucellose et d’autres maladies zoonotiques » affirme Prof. Gilbert Fokou, membre du programme transversal « Action collective et changement de comportements » du consortium Afrique One.

Travailler ensemble de manière coordonnée dans la lutte contre la brucellose

Les connaissances existent sur la brucellose et nécessitent leur mise à disposition par des canaux appropriés à chaque acteur exposé ou ayant une part de responsabilité dans la gestion de la maladie. Il y a donc nécessité de renforcer les capacités des différents acteurs (hommes, femmes, agents de santé humaine et animale) afin qu’ils aient plus d’éléments de connaissance dans la gestion de la maladie. Selon les chercheurs d’Afrique One, cela revient à renforcer la coordination, la collaboration et la communication entre les agents de santé humaine et animale d’une part et en confrontant les connaissances et pratiques des communautés avec les éléments scientifiques, co-concevoir des interventions efficaces et bénéfiques à tous.

« Les interventions sur les animaux à travers la vaccination de masse du bétail sont une condition préalable au succès des stratégies de lutte contre la brucellose. Mais pour une action durable, il faudrait des partenariats intersectoriels et à l’harmonisation des informations sur la brucellose chez toutes les parties prenantes », affirme Prof. Bassirou Bonfoh, Directeur d’Afrique One.

De 2016-2022, le consortium Afrique One, financé parun consortium de bailleurs que sont le Wellcome Trust, DFID et autres, a formé 72 boursiers en Afrique dont 11 ont mené des recherches transdisciplinaires sur la brucellose. Ils ont identifié les déficits en matière de circulation des connaissances, et les insuffisances de collaboration malgré les avancées dans le diagnostic et la vaccinologie de la maladie. Les travaux sur cette thématique ont produit une quinzaine de publications scientifiques.

Crédit photo : Dr Stéphane Babo

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